Le recours au fabricant habituel d’une société concurrente n’est pas un acte de concurrence déloyale

La Cour d’appel de Paris a jugé que la reprise des caractéristiques générales d’une gamme de produits ne permettait pas, à elle seule, de caractériser des actes de concurrence déloyale en l’absence de manœuvres déloyales. 

Une société de l’industrie de la mode avait constaté que l’une de ses concurrentes commercialisait une gamme de sous-vêtements féminins présentant, selon elle, une très forte ressemblance avec l’une de ses propres gammes.

La société avait alors assigné sa concurrente devant le Tribunal de commerce de Paris estimant que la conception et la commercialisation de la gamme de sous-vêtements litigieuse relevaient d’une démarche déloyale et parasitaire.

Déboutée de ses demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire par le Tribunal, la société avait interjeté appel. 

Dans un arrêt du 8 février 2023, la Cour d’appel de Paris a confirmé le jugement de première instance.

La similitude entre deux gammes de produits résultant des procédés de fabrication utilisés ne relève pas de la concurrence déloyale

L’appelante estimait que les caractéristiques distinctives de sa gamme de produits – les finitions thermocollées, la découpe des bordures en forme de mini-vagues, les matières, les formes, etc. – avaient été reprises par la société concurrente.

Ces ressemblances généraient, selon elle, une impression sensiblement identique et un risque de confusion dans l’esprit des consommateurs.  

La Cour d’appel a rappelé que le seul fait de commercialiser des produits identiques ou similaires à ceux distribués par un concurrent n’est pas fautif dès lors que : 

  • ces produits ne font pas l’objet de droits propriété intellectuelle, et que
  • leur commercialisation n’est pas accompagnée de manœuvres déloyales, telles que la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle. 

En l’espèce, l’appelante ne justifiait pas être titulaire de droits privatifs sur les produits de sa gamme ou sur leurs éléments essentiels.

Par ailleurs, la Cour a considéré que les matières et formes étaient communes dans le secteur et que les ressemblances liées aux finitions thermocollées et à la découpe des bordures étaient dues aux procédés techniques utilisés par le fabricant commun des sociétés.

Sur ce dernier point, la Cour a constaté que l’appelante ne bénéficiait pas de droits sur le savoir-faire issu des technologies en question, qui apparaissait être détenu par le fabricant. De plus, aucun engagement d’exclusivité ou de confidentialité ne lui avait été contractuellement consenti par ce fabricant. 

Dès lors, la Cour d’appel a jugé que la société concurrente n’avait pas commis d’acte de concurrence déloyale en faisant appel au même fabricant que sa concurrente, et ce bien qu’elle ait ainsi pu bénéficier du savoir-faire de celui-ci.

La notoriété et le positionnement du concurrent sur le marché peuvent être des indices de l’absence de comportement parasitaire

La société appelante soutenait également que la reproduction quasi servile de sa gamme de produits était constitutive de parasitisme.

La Cour a rappelé la définition du parasitisme qui « consiste pour un acteur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts, de son savoir-faire, de sa notoriété et de ses investissements ». 

Il appartenait ainsi à l’appelante de démontrer que sa concurrente avait obtenu un avantage concurrentiel en copiant, à titre lucratif et de façon injustifiée, sa gamme de sous-vêtements, fruit de son savoir-faire, de son travail intellectuel et d’investissements. 

Contrairement à ce que soutenait l’appelante, la Cour a constaté que la société concurrente justifiait d’importants efforts d’investissements dans la recherche, la conception, et la promotion de sa gamme de produits. 

En outre, elle démontrait bénéficier d’une notoriété propre et d’un positionnement sensiblement plus haut de gamme que celui de l’appelante sur le marché des sous-vêtements féminins. 

Au regard de ces éléments, la Cour d’appel a jugé qu’il n’était pas démontré que la société concurrente avait cherché à se placer dans le sillage de l’appelante afin de profiter de sa notoriété, de son savoir-faire et de ses efforts de création et de promotion.

Que retenir de cet arrêt ?

  • En l’absence de droit privatif, le fait de faire appel au fabricant habituel d’une société concurrente, non tenu à un engagement d’exclusivité ou de confidentialité, afin de profiter du savoir-faire de celui-ci n’est pas constitutif de concurrence déloyale. 

  • Outre les investissements consentis, la démonstration de la notoriété et du positionnement plus haut de gamme d’un acteur économique permettent d’écarter le parasitisme.

Lire l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 8 février 2023, RG n°21/07680

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