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La protection de la dignité humaine peut-elle constituer un motif de restriction à la liberté de création artistique ?
Par un arrêt du 17 novembre 2023, la Cour de cassation, a jugé que le principe du respect de la dignité humaine, prévu par l’article 16 du Code civil, ne permet pas, à lui seul, d’entraver la liberté d’expression, et en particulier la liberté de création artistique.
La Cour a précisé que deux conditions doivent être réunies pour que la liberté d’expression puisse être restreinte :
- La restriction doit être prévue par la loi ; et
- Justifiée par l’un des objectifs énumérés à l’article 10§2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (sécurité nationale, protection des droits d’autrui, etc.).
Lire l’arrêt de la Cour de cassation du 17 novembre 2023, n°21-20.723
Luxe et mode : Une société de prêt-à-porter qui s’inspire des modèles phares d’une marque de luxe se rend-elle coupable d’actes de concurrence déloyale ?
Une marque de luxe reprochait à une société de prêt-à-porter de commercialiser des articles reprenant ses modèles à succès, concomitamment à sa propre commercialisation.
Par un arrêt du 10 novembre 2023, la Cour d’appel de Paris a fait droit à ses demandes sur le fondement de la concurrence déloyale par actes de parasitisme en considérant que :
- La marque de luxe démontrait que les modèles litigieux étaient des produits phares et partant, constituaient des valeurs économiques individualisées.
- Les reprises, qui individuellement peuvent être non fautives, étaient en l’espèce répétées et commercialisées peu après les défilés de ladite marque.
- Les modèles repris étaient pour la plupart issus d’une même collection, ce qui générait une évocation des produits de la marque de luxe dans l’esprit de leur clientèle.
Lire l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 10 novembre 2023, RG n°21/19126
Indication géographique (« IGPIA ») : Une appellation spécifique au produit doit-elle préexister au dépôt de l’IGPIA ?
Une association avait demandé le dépôt d’une IGPIA sous une dénomination qui n’existait pas, dans le commerce ou le langage commun, afin de désigner les produits bénéficiant de l’indication.
Par un arrêt du 15 novembre 2023, la Cour de cassation a jugé que le déposant d’une IGPIA n’avait pas à établir l’existence d’une appellation antérieure spécifique au produit.
La Cour a ainsi rappelé que la seule condition pour accéder à la protection tenait au fait que le produit présente au moins une caractéristique pouvant être attribuée à son origine géographique.
La protection conférée aux produits industriels et artisanaux, qui était initialement une spécificité française, vient d’ailleurs d’être étendue au niveau européen par le Règlement IGPAI d’octobre 2023.
Lire l’arrêt de la Cour de cassation du 15 novembre 2023, n°22-12.858
RGPD : un prestataire de santé peut-il produire les données personnelles de ses patients pour obtenir une mesure d’instruction ?
Un prestataire de santé, soupçonnant un concurrent direct d’avoir détourné sa patientèle, avait produit en justice une liste de patients afin d’obtenir une mesure d’instruction.
Le concurrent visé contestait la licéité de cette mesure d’instruction, considérant que l’utilisation sans leur consentement des données personnelles des patients violait le RGPD.
Par un arrêt du 10 novembre 2023, la Cour d’appel de Nîmes a jugé que la production en justice de données constituait une nouvelle finalité de traitement, pour laquelle les personnes concernées n’avaient pas consenti.
En revanche, la production de la liste était indispensable au succès de la mesure d’instruction, qui en outre été circonscrite à la recherche d’informations portant sur la prétendue concurrence déloyale.
Ainsi, la Cour a considéré que le consentement des personnes concernées par la mesure d’instruction n’était pas un préalable obligatoire à la production de leurs données.
Lire l’arrêt de la Cour d’appel de Nîmes du 10 novembre 2023, RG n° 23/01298