Dans un environnement numérique en constante évolution, la sécurisation juridique des contrats informatiques est devenue incontournable.
Contrat de développement informatique, licence SaaS, contrats d’intégration, etc., les entreprises sont quotidiennement confrontées à la signature de contrats informatiques.
Pourtant, le succès d’un projet informatique implique un encadrement juridique complet, depuis l’expression des besoins et la rédaction d’un cahier des charges jusqu’à la phase de post production. Cet encadrement est nécessaire pour anticiper les risques inhérents au projet et sécuriser tant le prestataire que le client.
L’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 21 mars 2025 illustre parfaitement l’importance d’une telle sécurisation juridique.
Dans cette affaire, la Cour devait se prononcer sur la responsabilité d’un prestataire informatique, chargé de la refonte de deux sites Internet, à qui le client reprochait notamment de nombreux dysfonctionnements et retards.
L’importance de formaliser une expression des besoins claire et précise
Tout projet informatique impose au client de formaliser précisément ses besoins dans un cahier des charges, préalablement à la signature du contrat.
L’expression des besoins n’est pas un document contractuel obligatoire, mais elle constitue un élément clé pour assurer la bonne exécution des prestations attendues.
Les besoins exprimés doivent y être décrits de manière exhaustive, et doivent notamment préciser :
- Les objectifs poursuivis dans le cadre du projet ;
- Les fonctionnalités attendues ainsi que les résultats escomptés, tant en termes de performance que d’ergonomie ;
- Les délais et dates impératives ;
- L’état de l’existant ;
- L’environnement dans lequel sera implantée la solution.
En définissant ses besoins ainsi que les exigences fonctionnelles et techniques, le client encadre son projet et fixe les fondations de l’engagement du prestataire. Ce document sert également de référence précieuse en cas de différend entre les parties.
L’importance d’anticiper et d’organiser contractuellement les évolutions d’un projet
Un projet informatique, comme la refonte d’un site internet, peut se révéler long et complexe. Pour en garantir le bon déroulement, il est essentiel de maîtriser les risques de dérive, tant en matière de calendrier que de budget.
Cette maîtrise passe notamment par une clarification des contraintes du client, en particulier s’agissant du respect des délais. Dans la mesure du possible, il est conseillé de fixer des dates impératives correspondant aux étapes clés du projet, tout en prévoyant les conséquences en cas de non-respect. Il peut également être pertinent d’associer le paiement du prix au respect de ces dates impératives.
Par ailleurs, il convient de distinguer clairement les demandes de précisions des demandes d’évolutions nouvelles, ces dernières étant susceptibles d’avoir un impact tant sur le calendrier comme sur le budget.
Le contrat doit définir les modalités d’acceptation et de gestion des évolutions. Celles-ci doivent faire l’objet d’un accord exprès entre les parties avant toute mise en œuvre. Cette approche permet de prévenir les malentendus et de garantir une vision partagée des attentes et des conséquences de ces modifications.
En l’espèce, en raison des retards liés aux nombreuses demandes d’évolutions du client, un avenant a été signé pour ajuster les coûts et fixer de nouvelles dates de livraison. La Cour d’appel de Paris a considéré que cet avenant était suffisamment clair et précis et jugé que le prestataire avait respecté ses obligations, la nouvelle échéance remplaçant celle du contrat initial.
L’importance d’encadrer la période de garantie à l’issue de la mise en production
La clause de garantie post-production (aussi appelée « garantie de bon fonctionnement » ou « hypercare ») est couramment incluse dans les contrats de développement informatique. Cette garantie prend effet à l’issue de la signature de la recette définitive (livraison opérationnelle du logiciel ou du site).
Ses objectifs sont multiples :
- Permettre au prestataire de corriger, pendant une période déterminée, les éventuels dysfonctionnements ou anomalies qui pourraient survenir, et ce sans frais supplémentaires pour le client ;
- Réduire les risques de litiges relatifs à la conformité du livrable ;
- Assurer la transition entre la phase de développement et le contrat de maintenance, qui prend généralement le relais.
Il est important que cette clause soit activée et utilisée conformément aux termes du contrat. Dans l’hypothèse où le client décide de ne pas poursuivre avec la maintenance prévue, il ne pourra pas reprocher au prestataire la non-correction des anomalies qui surviendraient à l’issue de la période d’hypercare. C’est précisément ce qu’illustre l’arrêt du 21 mars 2025 précité.
En l’espèce, le contrat prévoyait une période de garantie post-production de deux mois à compter de la mise en production du site. À son terme, le client a refusé d’activer le contrat de maintenance, empêchant ainsi le prestataire de corriger les bugs apparus ultérieurement.
Lire l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 21 mars 2025 n° 22/17566