La Cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné le concurrent ayant copié les codes esthétiques et conceptuels d’une franchise à hauteur de l’avantage concurrentiel indu qu’il s’était ainsi procuré.
Une société, créatrice d’une franchise de restauration sur le thème des micro-brasseries (le « Franchiseur »), avait constaté l’ouverture d’un restaurant, reprenant les codes de son concept, par un ex-candidat à la franchise (l’« Ancien Candidat à la Franchise »).
L’Ancien Candidat à la Franchise, qui avait mis fin à son contrat avant l’ouverture du restaurant en cause, avait été assigné devant le Tribunal de commerce et définitivement condamné pour rupture abusive du contrat de franchise.
En parallèle, le Franchiseur l’avait assigné devant le Tribunal de Grande Instance en contrefaçon, concurrence déloyale et parasitisme. Le Tribunal s’était toutefois limité à condamner l’Ancien Candidat à la Franchise à réparer le préjudice moral subi par le Franchiseur au titre des actes de concurrence déloyale et de parasitisme.
Insatisfait, le Franchiseur avait interjeté appel du jugement en vue d’obtenir l’indemnisation de son préjudice économique tiré de la concurrence déloyale et du parasitisme.
Dans un arrêt du 9 février 2023, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a fait droit à ses demandes et condamné l’Ancien Candidat à la Franchise à lui verser des dommages-intérêts.
La reprise des caractéristiques d’une franchise peut être fautive
La Cour d’appel a tout d’abord rappelé que la concurrence entre deux sociétés sur un même secteur de marché n’est pas en soi un acte fautif.
Elle a également souligné que si le concept de brasserie, qui ne relève pas du monopole du Franchiseur, implique nécessairement la reprise de standards, il existe toutefois différents moyens d’en décliner les codes.
Dès lors, l’Ancien Candidat à la Franchise pouvait légitimement utiliser le concept de brasserie en s’abstenant de reprendre les codes propres à la franchise.
La Cour d’appel a toutefois constaté que l’Ancien Candidat à la Franchise avait imité le concept de franchise en reprenant les éléments caractéristiques de celui-ci (nature du restaurant, menus, décoration, aménagement, etc.) dont il avait eu connaissance lors de sa candidature au réseau. En outre, il utilisait une enseigne à la dénomination similaire à celle de la franchise.
Aussi, la Cour a considéré que la copie des codes esthétiques et conceptuels de la franchise créait un risque de confusion qui avait permis à l’Ancien Candidat à la Franchise de capter une clientèle similaire en profitant des investissements réalisés par le Franchiseur.
En outre, la Cour a relevé que la concurrence déloyale et le parasitisme étaient accentués par l’utilisation de l’emplacement et du local prévus pour l’installation de la franchise et favorisés par l’embauche de salariés du Franchiseur et le détournement de produits et matériels issus du réseau.
Par conséquent, la Cour d’appel a confirmé le jugement de première instance en ce qu’il avait retenu l’existence de faits de concurrence déloyale et de parasitisme.
Le préjudice économique du franchisé peut être limité à l’avantage concurrentiel indu perçu par le concurrent
En première instance, le Franchiseur avait sollicité la réparation du préjudice correspondant au montant des redevances qu’il aurait pu percevoir au titre du contrat de franchise.
Le Tribunal, suivi par la Cour d’appel, l’avait débouté de sa demande estimant que ce préjudice avait déjà été indemnisé dans le cadre du jugement ayant statué sur la rupture du contrat de franchise.
En cause d’appel, le Franchiseur soutenait que le préjudice économique résultant des actes de concurrence déloyale et du parasitisme pouvait également être évalué en considération de l’avantage indu que s’était procuré l’Ancien Candidat à la Franchise.
Suivant ce raisonnement, la Cour a considéré que le préjudice du Franchiseur était constitué des économies réalisées par l’Ancien Candidat à la Franchise sur le budget publicitaire, les honoraires d’architecte, la confection des menus et la formation des salariés.
Après avoir jugé que les préjudices tirés de la perte de redevances et de l’avantage indu étaient distincts, la Cour d’appel a condamné l’Ancien Candidat à la Franchise à réparer le préjudice économique subi par le Franchiseur.
Lire l’arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 9 février 2023, n°19/12866.